Tu sens l'angoisse palpiter dans ta poitrine.
Elle ressemble à un vertige qui te prendrait assise, elle ressemble à la tête qui tourne lorsque tu te lèves trop vite, sans t'être levée trop vite.
Elle pose un lustre noir sur le voile des choses.
Tu as appris à la reconnaître comme une couleur, une odeur, comme un goût. L'angoisse a la saveur de l'acier dans ta bouche, et cette sensation de lame enserrée dans la chair de ton ventre comme ces arbres qui en croissant intègrent dans les couches successives de leur écorce les fils de fer dont on les a meurtris.
Tu as appris à reconnaître l'angoisse et aussi son absence. Ce matin la sensation de te réveiller sous un ciel dégagé, la joie tranquille d'un siège levé, pas d'ivresse ni d'exultation, juste un doux contentement, le soulagement de la sortie du tunnel. L'absence d'angoisse n'est pas un phénomène en soi, il n'y a pas de saveur particulière de la normalité, de même qu'il n'y a pas de goût de l'absence d'ananas, mais tu sais pourtant très bien reconnaître quand tu n'es pas en train de sentir le goût de l'ananas.
L'angoisse est descendue sur toi vers onze heure, dans la lumière blanche crue du milieu du jour. Tu l'as vue arriver de loin, quelques signes avant-coureurs vite dissipés, tu as cru pouvoir échapper jusqu'à ce que la main de fer soit descendue. Elle t'a saisie par l'arrière du crâne qu'elle a transformé en pierre vaguement douloureuse.
Vaguement. Rien de saillant, rien d'excessif.
Installée stable jusqu'à la prochaine relâche.
Tu vas pouvoir continuer tranquillement comme ça.
Nous sommes en montagne, et les tunnels se succèdent au long des précipices, jusqu'à on ne sait quand.
vendredi 4 décembre 2015
jeudi 3 décembre 2015
Des femmes
A la fin tu ne fréquentes plus que ces femmes à la voix monocorde et au regard vide, ces femmes à la présence lourde qui te parlent d'horreurs à hurler mais à voix basse et s'enlisent en parlant dans des boues noires où elles t'entraînent, ces femmes auxquelles tu tends la main en sachant bien que tu ne pourras pas les tirer de là, tout juste les aider à rester à la surface, ces femmes qui te parlent de leur vie et tu sens la tristesse qui t'enveloppe comme un drap froid, sale, grise, tu la sens infuser ta vision du monde et c'est comme le brouillard, la beauté en moins.
Elles le sont toutes devenues, les unes après les autres, attirées dans le puits sans fond, l'une après l'autre un jour se sont mises à parler de cette voix monocorde et ont dévoilé cette cendre qui les ronge à la moelle, leurs couleurs vives éteintes comme soufflées une à une, les apparences disparues pour laisser place à cette seule entière nue vérité, leur vulnérabilité intérieure, comment elles ont été heurtées minées tuées dans l'indifférence au point qu'il ne leur reste d'énergie grise qu'à peine pour cette voix monocorde avec laquelle elles racontent, et on leur en voudra de raconter, la violence que chacun aimerait mieux tue car la dire la rend présente à nouveau et à les entendre parler c'est comme un direct à l'estomac qui vous donne la nausée et c'est pourquoi on leur en voudra d'avoir accepté leurs confidences et à l'avenir les évitera.
Et elle aussi à présent elle en fait partie, de ces femmes à la voix monocorde que l'on hésite à revoir car la guerre qu'elles racontent est trop lourde à porter, depuis longtemps elle en fait partie mais tu le sais seulement maintenant, maintenant elle sent monter en elle cette voix monocorde et ce regard fixe, un peu trop ouvert et focalisé sur rien, un peu effrayant, et elle voit se créer le vide autour d'elle, l'humanité s'éloigner comme respectant une distance sacrée.
Pourtant ce sont les mêmes femmes qui scintillent d'un rire non feint, font des plaisanteries limite, se passionnent dans une conversation, ont la voix qui monte très haut sans presque se briser pour des riens, la voix qui tonne de conviction, les mêmes qui semblent sortir d'une chanson de Fauve, les mêmes les yeux soulignés de noir, les mêmes dans du velours, les mêmes si fortes, les mêmes qui déplacent des montagnes sans que personne ne voie qu'elles sont en même temps à pleurer des rivières, les mêmes qui le plus souvent ne pleurent pas.
Ce sont les mêmes.
Elles le sont toutes devenues, les unes après les autres, attirées dans le puits sans fond, l'une après l'autre un jour se sont mises à parler de cette voix monocorde et ont dévoilé cette cendre qui les ronge à la moelle, leurs couleurs vives éteintes comme soufflées une à une, les apparences disparues pour laisser place à cette seule entière nue vérité, leur vulnérabilité intérieure, comment elles ont été heurtées minées tuées dans l'indifférence au point qu'il ne leur reste d'énergie grise qu'à peine pour cette voix monocorde avec laquelle elles racontent, et on leur en voudra de raconter, la violence que chacun aimerait mieux tue car la dire la rend présente à nouveau et à les entendre parler c'est comme un direct à l'estomac qui vous donne la nausée et c'est pourquoi on leur en voudra d'avoir accepté leurs confidences et à l'avenir les évitera.
Et elle aussi à présent elle en fait partie, de ces femmes à la voix monocorde que l'on hésite à revoir car la guerre qu'elles racontent est trop lourde à porter, depuis longtemps elle en fait partie mais tu le sais seulement maintenant, maintenant elle sent monter en elle cette voix monocorde et ce regard fixe, un peu trop ouvert et focalisé sur rien, un peu effrayant, et elle voit se créer le vide autour d'elle, l'humanité s'éloigner comme respectant une distance sacrée.
Pourtant ce sont les mêmes femmes qui scintillent d'un rire non feint, font des plaisanteries limite, se passionnent dans une conversation, ont la voix qui monte très haut sans presque se briser pour des riens, la voix qui tonne de conviction, les mêmes qui semblent sortir d'une chanson de Fauve, les mêmes les yeux soulignés de noir, les mêmes dans du velours, les mêmes si fortes, les mêmes qui déplacent des montagnes sans que personne ne voie qu'elles sont en même temps à pleurer des rivières, les mêmes qui le plus souvent ne pleurent pas.
Ce sont les mêmes.
La culpabilité, c'est une maladie
Impression tenace et récurrente, en sortant de chaque séance, que j'entrave le processus thérapeutique, que mes paniques, mes angoisses effrénées apportées à dose hebdomadaire se mettent en travers de la méthode, que si je n'étais pas aussi fucked up, la thérapie avancerait mieux et plus rapidement.
Absurde, puisque c'est précisément parce que je suis en vrac que la thérapie a lieu - si je n'étais pas si pleine d'angoisses, il n'y aurait pas de thérapie.
Absurde, puisque c'est précisément parce que je suis en vrac que la thérapie a lieu - si je n'étais pas si pleine d'angoisses, il n'y aurait pas de thérapie.
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