tag:blogger.com,1999:blog-52930429704952270392024-03-13T16:19:21.663-07:00Ephraktionça casse et ça brûle.Unknownnoreply@blogger.comBlogger106125tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-1625535032384834192016-06-10T12:37:00.000-07:002016-06-10T13:00:03.689-07:00ProsopagnosieDe la pâte à pain en train de lever.<br />
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C'est à peu près la seule façon dont je puisse exprimer ce que je vois dans le miroir, neuf fois sur dix et encore : mon visage, c'est de la pâte à pain.<br />
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C'est peut-être de cette incapacité à reconnaître un visage humain dans ce que je perçois de moi que vient ma difficulté à reconnaître les visages en général. J'ai dans mon sac plus d'anecdotes qu'il n'en faut, que je préfère trouver drôles, qui montrent assez à quel point les visages sont dépourvus de signification pour moi. Je les confonds tous, absolument. J'échoue à les saisir comme critère pertinent d'identification. Ils sont comme une écriture inconnue, que je n'aurais pas seulement du mal à déchiffrer, mais même à percevoir comme étant une écriture.<br />
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Enfant, j'imaginais sincèrement qu'en mettant une perruque et des lunettes pour venir à l'école, en mentant sur mon nom, personne ne me reconnaîtrait et je pourrais passer pour une autre personne. Une nouvelle. Une inconnue. Je n'imaginais pas une seconde que mon visage puisse être un élément important de reconnaissance, qu'il puisse être ce par quoi on m'identifie et me différencie d'autrui.<br />
<br />
Mon visage, je le perçois comme un smiley : des yeux, une bouche sur une surface, quelque chose d'abstrait. Un concept de visage. Impossible à reconnaître ou à humaniser. La défaite de Levinas.<br />
<br />
J'en interroge les formes, elles me sont toujours étrangères. J'échoue à les mémoriser ou à les percevoir comme une totalité signifiante.<br />
<br />
De la pâte à pain.<br />
<br />
J'ai mis longtemps à comprendre qu'il n'en allait pas de même pour les autres gens. Que mon incapacité à reconnaître un visage dans un visage était une exception. Que pour les autres, cela se passait autrement - d'une manière qui m'est et me sera sans doute toujours incompréhensible. Qu'ils avaient un sens dont je suis dépourvue. A vrai dire, c'est une découverte récente. Deux ans, trois au plus. Le jour où j'ai entendu parler pour la première fois de prosopagnosie, je l'ai vécu comme un retour au foyer après un interminable exil. Enfin j'étais chez moi.<br />
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Mon visage en miroir est toujours nouveau. Il n'est pas ce que je m'attends à trouver là. Je ne m'attends à rien. Sur les photographies, il me choque par cette impression de radicale étrangeté. Je n'arrive pas à y trouver une unité. Sans même parler de le percevoir comme "moi", le percevoir comme un ensemble signifiant, quelque chose qui puisse avoir un nom, porter un sens. Les photographies me sont toujours violentes, car tandis que j'y perçois les visages des autres au moins comme étant des visages, le mien échoue à mes yeux à se constituer en forme. C'est toujours de la pâte à pain.<br />
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Parfois, certains jours pleine d'énergie et d'assurance, ce que je croise dans le miroir est une personne. C'est un sentiment exaltant, d'autant plus intense qu'il est plus rare. J'en suis débordée de joie et d'enthousiasme. Ce sont des jours où je me sens forte et confiante - ce sentiment soudain que ce que je porte en sortant dans la rue, ce lieu d'où je perçois le monde, ma façade au regard des autres, c'est un visage, et non de la pâte à pain.<br />
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Mais c'est un sentiment qui passe, non une connaissance que je pourrais acquérir une fois pour toutes. Jamais ne se conserve pour plus tard le souvenir de cette unité de mon visage que j'ai fugacement perçue.Unknownnoreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-35123348958215310622016-05-17T08:10:00.001-07:002016-05-17T08:11:00.345-07:00Au pasParfois cette impression qu'une armée me traverse.<br />
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Je sens le sol en moi vibrer sous leurs pas.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-61952087763156956672016-03-03T08:27:00.001-08:002016-03-03T08:41:33.135-08:00Un minuscule éléphantDepuis mon bureau je vois, dans le renfoncement de la fenêtre en hauteur, dès que je lève les yeux, ce miton de poussière resté accroché à une aspérité de la peinture dont la forme vue d'ici rappelle celle d'un minuscule éléphant traversant un désert acrylique.<br />
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Chaque fois la pensée suivante concerne la manière dont je pourrais, en montant sur un meuble, en étirant mon dos mes bras la pointe de mes pieds, à l'aide d'un chiffon, décrocher cette poussière, nettoyer cette surface, immaculée.<br />
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Et la suivante, combien me manquerait alors la silhouette familière de ce minuscule éléphant qui traverse, amical, le désert de mes pensées.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-6420002465056197902016-02-23T08:34:00.001-08:002016-02-23T08:34:24.407-08:00La première foisCela fait longtemps maintenant que nous nous connaissons et pourtant chaque fois c'est comme la première fois. Cette première fois où rien n'est encore décidé, où l'on n'est pas sûr de plaire. Où l'on se voit en sachant que quelque chose peut se passer, sans que ce soit gagné d'avance, où l'on sait qu'il va falloir oser sortir de la tétanie, surmonter sa timidité et la peur du râteau. Délicieuse incertitude.<br />
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Je frappe à ta porte, tu ouvres et nous ne nous jetons pas l'un sur l'autre pour mêler nos langues. Non. On se fait la bise. On se demande si ça va. Il y a toujours une sorte de réserve, de timidité. Nous ne nous prenons même pas dans les bras. J'en aurais pourtant envie, mais c'est comme si j'ignorais que toi aussi. Ta présence me plonge instantanément dans le désir et le doute à la fois.<br />
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Nous commençons par discuter entre bons amis, avec ce sous-texte du désir entre nous, que nous ignorons superbement. Il n'y a pas d'accord tacite. Nous auront à reparcourir tout le chemin. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mamihlapinatapai" target="_blank">Mamihlapinatapai</a>. Nous passons un long moment comme ça, souvent plusieurs heures, sans nous toucher, prenant plaisir à être ensemble. Nous nous jetons des regards en coin. Nous prenons le temps de sentir si nous nous plaisons encore. Avec en arrière-plan cette tension dans le ventre - comment amener le sujet ? Et est-ce le sujet finalement ? - mais seulement en arrière-plan.<br />
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Parce que nous ne nous voyons pas <i>pour</i> faire l'amour. Mais il est rare, pourtant, qu'à un moment ou à un autre l'un de nous deux n'initie pas le contact. Timidement, comme si c'était la première fois. Toucher les mains, masser les épaules. Comme une proposition, comme une question. Un premier contact non-érotique qui pourra ou non être saisi comme une occasion d'aller plus loin. Ecouter la réponse, sentir la réaction. Laissant la porte ouverte à un "non" qui pourtant n'arrive jamais.<br />
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Et le premier baiser, alors, est toujours frais et intense comme si nous réalisions pour la première fois que notre désir est partagé. Nous nous embrassons timides, avec précautions, avec délicatesse, les lèvres parcourues de délicieux frissons à mesure que toute cette tension accumulée trouve peu à peu son accomplissement. Nous nous accueillons avec surprise et émotion.<br />
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Cette incertitude, ce sentiment que l'autre n'est réellement jamais acquis. Ce manque de confiance réciproque dans le désir de l'autre. Cela m'amuse de remarquer, grands maladroits, comme nous nous retrouvons à la case départ - à chaque fois, à chaque fois.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-48985142479490099132016-02-21T13:58:00.001-08:002016-02-21T13:58:36.292-08:00Le goût de l'angoisseComment t'expliquer l'angoisse, si tu ne l'as jamais connue ?<br />
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Tout ce que je pourrai faire, c'est essayer de te décrire à quoi ressemble la mienne. Car deux personnes jamais ne la vivent de façon exactement semblable ; elle varie en ses causes comme en ses manifestations ; et c'est pourquoi l'on vit parfois longtemps cette angoisse sans lui donner son nom, tant l'expérience est éloignée des définitions que l'on peut en lire.<br />
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Tu vois cette sensation que tu ressens au niveau du diaphragme à la veille de quelque chose d'important - un entretien, ou une présentation exigeante, que tu n'es pas certain-e de réussir ?Cette tension faite de peur et d'excitation, poussée à un point pénible, qui te coupe l'appétit et te donne la nausée ? Pour moi, l'angoisse, c'est comme avoir cette sensation - mais sans pouvoir lui assigner une cause : il n'y a rien le lendemain, ni entretien, ni présentation, rien.<br />
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Une appréhension vide.<br />
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Elle pourrait ressembler à certaines formes anxieuses de la joie, comme l'excitation que tu ressens à l'approche d'un rendez-vous avec une personne aimée, lorsque tu ne sais pas encore si c'est réciproque et que tu prévois de lui dévoiler tes sentiments ; ou encore cette inquiétude mêlée de désir qui te point au creux du ventre certains soirs où se fait sentir l'approche du printemps.<br />
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Mais l'angoisse ressemble à la joie anxieuse un peu à la manière d'un fruit pourri, où l'on reconnaît exactement le goût du fruit sain, mais poussé à l'extrême et corrompu jusqu'à l'infection. C'est par cette ressemblance que l'angoisse peut s'inviter dans la joie, ou la joie convoquer l'angoisse - de même que le goût du fruit sain longtemps ramènera avec lui, par contigüité, le souvenir atroce du fruit pourri.Unknownnoreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-54166799149810940142016-02-12T15:23:00.000-08:002016-02-12T15:23:08.534-08:00Je caresse une idéeJe n'aime pas les godes réalistes. Ils me répugnent vaguement, comme un sexe d'exhibitionniste, un sexe qui s'impose dans sa particularité sans avoir demandé la permission. J'aime la variété des physionomies des sexes masculins, et il y a ici un bel effort pour varier. Mais ce que j'aime surtout, dans la particularité d'un sexe, c'est que ce soit le sexe <i>de</i> quelqu'un, qu'il fasse partie d'une personne. Avec un gode, comment choisir entre telle ou telle forme ? Ce n'est le sexe de personne. C'est un peu triste. Alors j'aime autant une forme qui rappelle tout sauf un sexe.<br />
<br />
Même chose pour les couleurs. Je bloque sur les couleurs réalistes. Les couleurs chair sont tristes et flasques, les couleurs noires sont coloniales, dégradantes. Je fantasmerais plus facilement sur un gode vert fluo, qui au moins n'est pas raciste.<br />
<br />
Je caresse un moment l'idée, puis je passe.Unknownnoreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-65954642966792446962016-02-11T15:15:00.002-08:002017-04-05T11:34:25.838-07:00Mon homme intérieur<br />
Ce n'est pas mon homme intérieur qui fait de la menuiserie, change les roues de voiture ou porte les cheveux courts. Je n'ai pas besoin d'un homme pour cela.<br />
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Ce n'est pas davantage mon homme intérieur qui me rend forte. Pourquoi la force serait-elle nécessairement masculine ?<br />
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Avoir un homme intérieur, ce n'est pas avoir un macho intérieur. Mon homme intérieur ne se reconnaît pas dans une masculinité agressive.<br />
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Mon homme intérieur est non-violent. <br />
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Mon homme intérieur ne participe pas au concours de bites.<br />
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Mon homme intérieur parle doucement, écoute beaucoup.<br />
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Mon homme intérieur regarde les choses longuement et avec attention. <br />
<br />
Mon homme intérieur est un peu trop sérieux parfois (heureusement que je suis là pour faire des blagues).<br />
<br />
Mon homme intérieur est un "mec bien".<br />
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Mon homme intérieur questionne ses privilèges. <br />
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Mon homme intérieur est timide avec les femmes. Mon homme intérieur est timide tout court.<br />
<br />
Mon homme intérieur est bi. Ça nous fait deux points communs.<br />
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Mon homme intérieur est Versaillais.<br />
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Mon home intérieur est pas super sportif. <br />
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Mon homme intérieur a parfois peur de sentir mauvais.<br />
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Mon homme intérieur n'est pas à l'aise en société. <br />
<br />
Mon homme intérieur est beaucoup moins complexé maintenant qu'il y a quelques années.<br />
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Mon homme intérieur apprécie la coupe ample et les larges poches des vêtements masculins, qui lui permettent une grande liberté de mouvement et de trimbaler plein de trucs sans avoir à s'encombrer d'un sac. Ah non ça en fait c'est moi.<br />
<br />
Mon homme intérieur aime bien les zeugma, mais n'est jamais trop sûr de savoir comment les construire.<br />
<br />
Mon homme intérieur espère être aimé pour lui-même, et accepté tel qu'il est. <br />
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Mon homme intérieur se fait des clins d’œil dans la glace. <br />
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Mon homme intérieur assume sa part de féminité.Unknownnoreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-51626188430696905442016-02-08T17:58:00.001-08:002016-02-11T15:20:46.787-08:00Trop verts, et bons pour les goujatsJe te raconte à quel point j'aime mes cheveux courts.<br />
<br />
Et toi, là, tu glisse au passage que quand même, un carré, ça m'allait tellement mieux.<br />
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Et puis tu y reviens, régulièrement, de façon insidieuse.<br />
<br />
Ça me fait grincer des dents.<br />
<br />
Tu évoques cette période de mon existence depuis longtemps révolue, où j'étais <i>si jolie</i>. Est-ce que tu vas me demander de redevenir plus jeune, aussi ? <br />
<br />
En faisant ça, on pourrait prétendre que tu ne fais que manifester que je te plais. Toi-même, tu en es certainement convaincu. Si tu te préoccupes de ce qui me rendrait le plus belle, c'est bien que je te plais, non ?<br />
<br />
Mais non. J'ai pas besoin de ça pour le savoir, que je te plais. Que je te plais même avec mes cheveux courts de garçon. Que je te plais beaucoup, même. Ça transpire de partout dans nos conversations.<br />
<br />
Mais là, ce que tu es en train de dire, c'est quelque chose de différent, et c'est étrange : tu es en train de me dire que je ne te plais pas <i>assez</i>. Tu es en train de m'indiquer comment te plaire davantage. Comme si je ne te plaisais pas déjà suffisamment ! Alors que je ne suis même pas sûr que tu me plaises, toi !<br />
<br />
C'est drôle, tu sais, cette attitude. C'est curieux. Je me demande comment tu t'autorises. A essayer de me dicter mon apparence. On est même pas ensemble. Ça te rendrait pas plus légitime à le faire à mes yeux, remarque. Mais là, comment tu t'autorises ? Je vois pas autre chose que : parce que je te plais.<br />
<br />
C'est assez énorme. Paradoxal. Du fait que je te plais, tu te sens autorisé à m'envoyer des injonctions pour que je te plaise encore davantage. Comme si, en te plaisant, je commençais déjà à t'appartenir un peu. Comme si ça réveillait chez toi des démangeaisons propriétaires.<br />
<br />
Mais personne ne me possède, vois-tu.<br />
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Personne ne me dit comment m'habiller, me coiffer, me comporter, personne ne me fait rentrer dans des crasses de boîtes pour ses beaux yeux. Personne ne me somme de correspondre à ce qu'il considère comme une femme pour lui plaire.<br />
<br />
Te plaire est beaucoup moins important que me plaire moi-même. <br />
<br />
J'ai pas à te séduire. Si d'aventure je te plaisais pas, eh beh je me ferais une raison, tu sais. Je me contenterais de plaire à ceux à qui je plais.<br />
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Tu serais déjà tellement chanceux si tu pouvais m'avoir là, comme je suis, avec mes cheveux courts, mes pantalons, mon absence de maquillage et mes aisselles poilues. Parce que je suis géniale comme ça. Tu le sais, en fait. Je te plais. Je te plais beaucoup trop. Tellement trop que tu as perds le contrôle, et pour avoir l'illusion de le reprendre un peu, tu te sens obligé de me demander de changer.<br />
<br />
Mais tu vois, ça n'arrivera pas. Je vais rester comme je suis : extraordinaire. Et toi, tu vas rester tout seul.Unknownnoreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-49870491928628024752016-02-02T09:11:00.000-08:002016-06-10T11:55:33.952-07:00Note aux utilisateurs(1) Frotter vigoureusement ma chatte de haut en bas n'est pas sexy, mais : incroyablement douloureux. Mes petites lèvres sont faites d'une peau très fine et délicate, les léser met en péril les ébats à venir.<br />
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(2) Car non : je ne continue pas quand je suis si irritée que ça me fait mal. C'est comme ça. Faudra vous y faire.<br />
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(3) Mon clitoris n'est pas <i>là</i>, mais <i>là</i>.<br />
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(4) ON Y MET PAS LES ONGLES, FOUTRE DIEU !!! <br />
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(5) Si vous mettez trèèèèèèèèès longtemps à jouir, il y a certainement un moment où je dirai stop. C'est pas que je m'ennuie, pas de la mauvaise volonté non plus, c'est que les dix minutes de plus qu'il vous faudra pour aller au bout, pour moi ça veut dire douleur, serrer les dents (pas mon idée du plaisir) et des lésions qui mettront <i>des jours</i> à cicatriser. Donc prenez-vous en charge, merde.<br />
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(6) Il y a plein d'endroits du corps autres que les
organes génitaux qui sont jolis, agréables à toucher et fournisseurs
officiels de plein de plaisir. Je parle pas de mon corps, là, mais du
vôtre. Alors arrêtez donc de vous focaliser sur votre bite, ya <i>plein</i> de manières de faire l'amour.<br />
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(7) Je n'accepte pas de faire du sexe avec vous pour vous rendre un service. Je le fais parce que j'en ai envie et que ça me fait plaisir. Si ça ne me fait plus plaisir ni envie, point. Inutile de chercher à négocier, et j'arrive pas à croire que j'aie besoin de préciser ça.<br />
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(8) Essayer de me culpabiliser en me disant que "c'est dans la tête" n'est <i>pas une bonne idée</i>.<br />
<br />
(9) Grommeler dans votre barbe que je vous le paierai <i>non plus</i>.<br />
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(10) Perso, le <i>hate sex</i>, c'est pas mon truc. Du coup je vais essayer fort de pas vous haïr, mais facilitez-moi un peu la tâche, s'il vous plaît, merci.Unknownnoreply@blogger.com6tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-38324049090225773432016-01-28T14:48:00.000-08:002016-01-28T14:48:24.949-08:00Ecrit sur une table en boisLa première chose que je fais, toujours, c'est enfiler mes gants. Des gants de travail, enduits côté paume de cette matière antidérapante, je ne sais pas exactement ce que c'est. Ils s'ajustent presque exactement sur mes mains et je me sens grandir de quelques centimètres. J'aime cette sensation. Un léger frisson court dans ma poitrine. Revêtues de ces gants, mes mains deviennent autres. Fortes. Agiles. Capables. Et surtout : invulnérables. Pourtant jamais ces gants ne seraient assez résistants pour protéger mes mains d'un trait de scie circulaire. Pourtant je les mets aussi pour tracer, mesurer - choses qui ne mettent pas mes mains en péril. Mais lorsque je porte ces gants, c'est mon ethos menuisier que je revêts. Mes mains couvertes, et c'est tout mon corps, mon être entier qui devient plus puissant.<br />
<br />
Associer le bois, morceau par morceau. Travailler chaque pièce. Penser l'ensemble, et le voir peu à peu prendre forme. Déplacer les choses. Ne pas se soucier des postures que prend le corps. Respirer la poussière de bois. Ajuster.<br />
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Le casque sur le cou, le casque sur les oreilles. Voir les mèches de la perceuse entrer sans effort entre les veines du bois sans en entendre le bruit. L'odeur des copeaux légèrement brûlés. Concentrée, concentrée. Je tiens les choses ensemble dans ma tête avant de les tenir dans mes mains. Penser à de multiples paramètres en même temps. Penser justesse, équilibre, beauté. Avec les moyens du bord, construire quelque chose qui me fera plaisir à voir et à toucher.<br />
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Ne pas voir passer le temps.<br />
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Avoir soif.<br />
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Peu de mots trouvent place dans le processus. Un grognement satisfait de temps à autre.<br />
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Et parfois, au milieu d'une mesure minutieuse, je dois faire effort pour me souvenir de ne pas trop insister - qu'un millimètre de plus ou de moins à cet endroit n'est pas dramatique, que cela ne changera rien à l'équilibre du meuble, que je ne le percevrai pas du tout lorsque je serai assise à cette table pour écrire - non, ne te tracasse pas trop pour cette mesure, il y a une limite supérieure à la méticulosité, et ce n'est pas l'obsession du menuisier qui fera le grand roman - finalement, tout ce que je demande à cette table, c'est d'être suffisamment bonne pour écrire dessus.Unknownnoreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-34760363068751588142015-12-04T02:32:00.001-08:002015-12-04T02:32:54.754-08:00PhénoménaleTu sens l'angoisse palpiter dans ta poitrine.<br />
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Elle ressemble à un vertige qui te prendrait assise, elle ressemble à la tête qui tourne lorsque tu te lèves trop vite, sans t'être levée trop vite.<br />
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Elle pose un lustre noir sur le voile des choses.<br />
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Tu as appris à la reconnaître comme une couleur, une odeur, comme un goût. L'angoisse a la saveur de l'acier dans ta bouche, et cette sensation de lame enserrée dans la chair de ton ventre comme ces arbres qui en croissant intègrent dans les couches successives de leur écorce les fils de fer dont on les a meurtris.<br />
<br />
Tu as appris à reconnaître l'angoisse et aussi son absence. Ce matin la sensation de te réveiller sous un ciel dégagé, la joie tranquille d'un siège levé, pas d'ivresse ni d'exultation, juste un doux contentement, le soulagement de la sortie du tunnel. L'absence d'angoisse n'est pas un phénomène en soi, il n'y a pas de saveur particulière de la normalité, de même qu'il n'y a pas de goût de l'absence d'ananas, mais tu sais pourtant très bien reconnaître quand tu n'es pas en train de sentir le goût de l'ananas.<br />
<br />
L'angoisse est descendue sur toi vers onze heure, dans la lumière blanche crue du milieu du jour. Tu l'as vue arriver de loin, quelques signes avant-coureurs vite dissipés, tu as cru pouvoir échapper jusqu'à ce que la main de fer soit descendue. Elle t'a saisie par l'arrière du crâne qu'elle a transformé en pierre vaguement douloureuse.<br />
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Vaguement. Rien de saillant, rien d'excessif.<br />
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Installée stable jusqu'à la prochaine relâche.<br />
<br />
Tu vas pouvoir continuer tranquillement comme ça. <br />
<br />
Nous sommes en montagne, et les tunnels se succèdent au long des précipices, jusqu'à on ne sait quand.Unknownnoreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-91517931623258744952015-12-03T16:47:00.000-08:002015-12-04T02:34:11.328-08:00Des femmesA la fin tu ne fréquentes plus que ces femmes à la voix monocorde et au regard vide, ces femmes à la présence lourde qui te parlent d'horreurs à hurler mais à voix basse et s'enlisent en parlant dans des boues noires où elles t'entraînent, ces femmes auxquelles tu tends la main en sachant bien que tu ne pourras pas les tirer de là, tout juste les aider à rester à la surface, ces femmes qui te parlent de leur vie et tu sens la tristesse qui t'enveloppe comme un drap froid, sale, grise, tu la sens infuser ta vision du monde et c'est comme le brouillard, la beauté en moins.<br />
<br />
Elles le sont toutes devenues, les unes après les autres, attirées dans le puits sans fond, l'une après l'autre un jour se sont mises à parler de cette voix monocorde et ont dévoilé cette cendre qui les ronge à la moelle, leurs couleurs vives éteintes comme soufflées une à une, les apparences disparues pour laisser place à cette seule entière nue vérité, leur vulnérabilité intérieure, comment elles ont été heurtées minées tuées dans l'indifférence au point qu'il ne leur reste d'énergie grise qu'à peine pour cette voix monocorde avec laquelle elles racontent, et on leur en voudra de raconter, la violence que chacun aimerait mieux tue car la dire la rend présente à nouveau et à les entendre parler c'est comme un direct à l'estomac qui vous donne la nausée et c'est pourquoi on leur en voudra d'avoir accepté leurs confidences et à l'avenir les évitera.<br />
<br />
Et elle aussi à présent elle en fait partie, de ces femmes à la voix monocorde que l'on hésite à revoir car la guerre qu'elles racontent est trop lourde à porter, depuis longtemps elle en fait partie mais tu le sais seulement maintenant, maintenant elle sent monter en elle cette voix monocorde et ce regard fixe, un peu trop ouvert et focalisé sur rien, un peu effrayant, et elle voit se créer le vide autour d'elle, l'humanité s'éloigner comme respectant une distance sacrée.<br />
<br />
Pourtant ce sont les mêmes femmes qui scintillent d'un rire non feint, font des plaisanteries limite, se passionnent dans une conversation, ont la voix qui monte très haut sans presque se briser pour des riens, la voix qui tonne de conviction, les mêmes qui semblent sortir d'une chanson de Fauve, les mêmes les yeux soulignés de noir, les mêmes dans du velours, les mêmes si fortes, les mêmes qui déplacent des montagnes sans que personne ne voie qu'elles sont en même temps à pleurer des rivières, les mêmes qui le plus souvent ne pleurent pas.<br />
<br />
Ce sont les mêmes.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-32651521669092025112015-12-03T11:55:00.001-08:002015-12-04T02:36:09.096-08:00La culpabilité, c'est une maladieImpression tenace et récurrente, en sortant de chaque séance, que j'entrave le processus thérapeutique, que mes paniques, mes angoisses effrénées apportées à dose hebdomadaire se mettent en travers de la méthode, que si je n'étais pas aussi <i>fucked up</i>, la thérapie avancerait mieux et plus rapidement.<br />
<br />
Absurde, puisque c'est précisément parce que je suis en vrac que la thérapie a lieu - si je n'étais pas si pleine d'angoisses, il n'y aurait pas de thérapie.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-374225188133791062015-10-27T03:39:00.001-07:002015-10-27T03:39:52.811-07:00SaureJ'ai demi-ouvert un œil jaune sous une peau de pierre. Au premier mouvement j'ai senti craquer tout mon épiderme solidifié, se fissurer de bout en bout ma peau lithique. Je me suis étirée longuement, contorsions complexes, dans tous les sens, lentement redonnant du mouvement à chaque partie de mon corps, chaque frisson ouvrant des failles géologiques, fracturant ma peau de dragon millénaire en plaques tectoniques que je secouais de mon dos, de mon ventre, de mes bras.<br />
<br />
J'ai frictionné à la brosse dure ma peau de dragon, délogeant de ses rides canyoniques la poussière des siècles, balayant les écailles fossilisées, éradiquant férocement, plus souple à chaque mouvement, les couches de mon ancienne peau. J'ai brossé à rouge, à vif, sentant monter dans mes veines capillaires une chaleur de volcan, jusqu'à ce que des vestiges de peau morte il ne reste rien.<br />
<br />
Alors est apparue ma peau fine et souple de dragon nouveau-né, qui, plissée comme si elle avait été froissée serrée dans un œuf, s'est peu à peu dépliée au rythme de mes amples respirations, mes poumons de dragon fier prenant à chaque inspir davantage de volume, lents et puissants comme le soufflet d'une forge géante. Ma peau neuve s'est déployée, puis déployée à nouveau, et, alors que je croyais qu'elle en avait terminé, s'est déployée encore, épiderme sensible et résistant d'un nouveau dragon immense, et qui croît encore.Unknownnoreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-17851491433157306922015-09-22T03:40:00.000-07:002015-10-27T03:40:31.162-07:00Un progrèsJ'étais en train de choisir des pelotes de laine, former une association de nuances qui me plaisait, quand j'ai réalisé avec une lucidité glaçante que ce joli assortiment que je venais de composer, ce contraste de bruns ternes et de vert acide, c'était, tout droit sorties des années 80, les couleurs de la maison de mes parents lorsque j'étais enfant.<br />
<br />
Ce rapprochement a d'abord soulevé en moi une vague de nausée et de colère, comme si j'avais malencontreusement posé la main sur quelque chose de gluant et froid - de révoltant. Mais cela n'a duré qu'une seconde - immédiatement après est née en moi, et aussitôt m'a apaisée, la conscience qu'avoir eu une enfance traumatisante n'excluait pas d'avoir aussi, par ailleurs, de bons souvenirs d'enfance. Ou plus exactement : qu'avoir de mon enfance certains souvenirs agréable ne voulait pas dire que je validais celle-ci dans son ensemble. Que je pouvais repenser avec plaisir à certains éléments de mon enfance sans que cela veuille dire que j'avais aimé l'ensemble de celle-ci.<br />
<br />
Pour la première fois, mes pelotes de laine à la main, j'ai ressenti ce truc, non pas comme une vérité rationnelle, quelque chose dont on essaye de se persuader en se le répétant mais qui nous demeure désespérément extérieur ; mais au contraire comme un sentiment intime : avoir eu une enfance traumatisante ne m'interdisait pas d'aimer certains aspects non-traumatiques de mon enfance, comme les placards 80's de la cuisine et quelques bons moments en famille. Et sa réciproque : avoir aimé certaines choses de mon enfance ne signifiait pas que j'avais aimé les traumatismes que j'y ai subis.<br />
<br />
Pour la première fois j'ai lâché cette culpabilité qui, jusque-là, m'interdisait de m'avouer à moi-même que j'aimais quoi que ce soit de ma vie familiale, comme si cela signifiait que j'aimais ce qu'on m'y avait fait et que, par extension, je l'avais voulu, j'en étais responsable.<br />
<br />
Je l'ai compris réellement, ce qui veut dire ressenti profondément. J'avais le droit d'avoir de bons souvenirs de mon enfance et de mon adolescence. J'avais même le droit d'avoir de bons souvenirs de mon père, sans transiger d'un iota sur le mal qu'il m'a fait, sans pour cela prendre sur moi la responsabilité des actions qui restent à jamais les siennes.<br />
<br />
Pour la première fois j'ai senti se délier les deux choses - mon enfance, d'une part, et ce que j'y avais subi, d'autre part. Pour la première fois mes émotions ont fait le tri. Deux trucs qui étaient jusque-là inextricablement noués, j'ai pu les percevoir comme sans lien nécessaire entre eux. J'ai pu faire face sans culpabilité aux bons souvenirs de mon enfance.<br />
<br />
C'est profondément apaisant - de ne plus avoir à guetter, anxieuse, le moindre signe d'attachement à quelque chose issu de l'enfance comme si c'était la preuve que j'avais aimé, que j'avais voulu ce qu'on m'avait fait. De récupérer au moins quelques lambeaux d'une enfance normale.<br />
<br />
Cette idée là - qu'avoir, enfant, aimé sa famille, aimé ses parents, ne signifie pas que l'on doive se sentir responsable de ce qu'ils vous ont fait comme si on y avait consenti, je la porte à présent avec moi comme une force nouvellement acquise.<br />
<br />
Je vis sur de plus solides fondations.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-13132203477411807882015-09-07T08:15:00.003-07:002015-09-07T08:15:44.744-07:00Meta<img alt="" src="data:image/png;base64,iVBORw0KGgoAAAANSUhEUgAAAxkAAABlCAIAAACuibmPAAAVN0lEQVR4nO3d328bx4EH8PwL+hf2ifCDBfBFyBU8uY3ipgrdpocTYCOHwMCBbs0rHCDEBYcAB+RgveSqHJnWptMrZcuOLxZEX+LkTrDTKDZtKU4ds3ZspTJNybYoXyMrthJxSUncUrTuYcnZmd1Z7g8Of0j7/WAfqOXOzuw4XH45M2Se2QQAAAAAt55pdwMAAAAAtjBkKQAAAAD3kKUAAAAA3EOWAgAAAHAPWQoAAADAPWQpAAAAAPeQpQAAAADcQ5YCAAAAcA9ZCgAAAMA9ZCkAAAAA95ClAAAAANx75jEAAAAAuNXouJQCAAAAsKUIGY4ikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAAADAW4REKAJZCgAAALxFSIQikKUAANrh9nj5yO5yNLAdtiO7lT8l61+uLMvz8/MZD5ufn8/n8+ilZrDTtzpCIhSBLAUA0Abl3+3ZGH6x8t7fbYNtI/Fi+d0X61/vwsLC8vLyaqeam5trdhXLy8sLCwtbupc6lp2+1RESoQhkKQCANihHA5VTP982WzkaqH+9LQgrjWhN8+bm5rZ0L3Uyy77VERKhCGQpAIA2KEcDlZMvbZsNWcpmLVu6lzoZspQD6aHdkhS2mJZ3LBmWpN1DabuHz554eWfPa+cWBbcCALykHA1URn62bTbLLDU7O1vsYK1p3uzs7JbupU5m2bc6QiIU0fIslR7aLRnZjUedkaUSe307QqPIUgDgXjkaqIz8tMXb06l3NpVi5eNXhZ+5NVnqgIlisfj2229fvHixkXfixptnp5YW9JI3eTFLvfSvZ1gXZxyUbnGWSr35rIOgBQBgRzkaqJz4aSu3p5Pv1G7cxcpHr4o9eduz1IEDBxqJU8hSW50Xs5TrNNSGLJV681kng1YAAHaUo4HK8T0t255Oxth7d7Fy7lWB5++ELKXGKdfvxI03z04tLeglb0KWYp/sj6Vnzx0e+MEOSZKkHf49B4evLutKj86eOzzQu9MnSZJvZ+/A4XOzMjkiGZakcFLJTQzt/8EOSZICg58riqLItz8aOrinZ6dPUgvtH5rIMWW0uCTfHtnvl/zhZE6Z+nW/WoKZizRcgnx79I1qe6Qd/j0Hj1LnJtf0h6H9Jk0GAA8qRwMbx4Ot2SqTUd7tu1g5d0hUFW3PUo2/Ezd+Eju1tKCXvAlZin2ye9eunl2H4uevZrM3Lw0f2uWTfP2xNF3a7+/peXnwg6vZbPbqB4N7/cygUjIsSaG3hvp3Pn9w6PiZM2c+/nJRURRFHn/j568cjp/XCvn2n16kytROkUuG/dKOn8WuyYqiLD/MZo//oyQ992+fZrPZbDb7cNl4CelYv0/y7x18/9LNbPbqB0OhXT41iWlN9vX09PS8XDtC32QA8KByNLCReLEFW+UyL0ipCo9E1dLULKUbfKrP9Tux6+Y5qqV5veRxyFK6J32vjFDDOovJcLfkCydl7QDppaPU8io5GfZRySQZliRJ2v3WtbrjPmwrSJbKJcN+ydc/RBc2TgAyhRdP7/dJgTdTVIncaKi7Nh5mp8kA4EHlaGAj0d/srXL5P8xv38XKh78SVRGylM1axPRSZiTU19cXGskY9ql7tcefjYT6+gY/Mz0Jew6HMuYntzzMZlnbvJildEisSA/tlqS/f5ftkPOvd0vdr583PcCYi0j0MledCtT+2D00kTzU4/P1HErmDEfWyVLJsCQ999Y1poicDPukZ99M2WwyAHhQORrY+H1/UzeLIPXBrwTWZZmlstlswS01JNEPdM6ePUuylLsqGmmeo1qE9NKdkVBfKBTqC43cYfb1DU4YHtc/C3MKx+zVwz/MZlnbLPtWp8Hwo9MR3+OrzsOZZAx6J+8AkzEmljw7OfzGwHN/49/B+SGGZFiSuv1+nyRJ+4ZzupL1sxQ/FTlrMgB4UDka2Pj9T5q3WQWpfxJbXSuzVH2u34ldN89RLSJ6aWKwry80MjGihak71XGovr6+0OCg9njkDhVZtIOov0Mhdmf19Lp9E4Paian8Q+chTin2sMFB0ig7ZUlr1YKWqcuLWaruHJ/4LCVfG6KWND1cVjjjUpJ//8jk8Cs+3QwfshQANEU5Gtj4zxeatFVSb5vftYuV/w4LrxFZymYtAnpJjVJ3dCM7JuNS5GGtlDYcpaaVwYkCPUSljzhq8pkY7OMNYZGD+aWYw6pPT9SCEVu2WoA8OzHIlkCW0rHOUv2xW8xOwxyf4yx1/vVuqTsyTkWkW7F+bpnciCFNWczxnTvkszHHhywFAKxyNLDxux83Y6tcGjK/ZRcqZ8PNqLRdc3z07J5HspSWVZgwZZGlOFNq+hCj5Sva4ESBiTaGM9RObiylP6xgqMnQsOqzhhLIUjrWWYpdp50bDenXnjvOUsmwRKKNoiiKMnP0Jf0cH/ke32ioW/K/fl6mC7NhiV17ngx369eej7zi0609R5YCAFY5Gth498fCN4sglQw3o9KNd1uapdo7LrWPx34tDfcSNR/GxBaBWco4AGUca2LqsVh5hSxlyVHTFcXid891P3lg8psIjrPU4un9PsnX/y/qOd8f3Ov3+/2mZdQ0RX7UYDax1yf59w9fzWazV2/OGBuh/orC868NX7qZzV49Hz9k/E0EZCkA0ClHAxvHdovdKhfNg1SpUEkeFF4j2byTpQqGOOWolgZ7SZdaqJhhZ45PG2TS5ybjDCBzFossZVKKOYyeLaw7xxcauYM5Pkt1/3981Z/i1H76cod/z2vv39T/Vqfztee5CeqXMvcP/WE2Hes3L5MbDXVL3aFRNQ7Jt0df66+W/ef/4TVC1n6Ik/9bnchSAKBTjgY2jj0vcjv9D6Z36lKhkvyl4OrYrb3f49Md5oLT5rkIUgUBWcowAKQtZLLKUvTacyr16ENMgR75IjVZZSl+KfYwrD2vw1HTLSFjAIBHlKOBjfjzArfK1LHNUqFy8debpQJzmy4VKmO/FFuXcbPMUnfv3pXdUkMSeVCfuypcNG/fvn0uamleL21bnx7u6wudmLE4yrJvdRoMPzrIUgAAbVCOBjbifQK3p4/nnt75ZCPeVxn7hRanSoXK2C/EVsTdPJil3NXSvF7aVmZO0KvZrZMUshQNWQoAPKIcDWwceU7YdvLlzc3NysS/q38+/fLk5ubmZqlQGT0gshbzrTVZqnmQpbY6ZCkNshQAeEQ5Gigf+ZGorTJ5dHNzszLxVuXOBXVQ6unj2Y3RAwKrsNian6WEj0Xp3okbP4mdWprXSx6HLAUA4DnlaKD82x+K2p4+nlXvyU8fz1auHNk4uU/gyW1tyFL2amleL3kcshQAgOeUo4Hyb34oant6b7Jy5cjGyD6B53S2NTNLtQCy1FaHLAUA4DnlaKD8m13bZ0OWslfLlu6lToYsBQDgOeVooPxO7/bZrLJUJpPJd7DWNC+TyWzpXupkln2rIyRCEchSAABtUI4GyrG/3T4bspS9WrZ0L3UyZCkAAM8px39Sjga2z3b0hfrXOz8/v7S01O43XFMtCDFLS0sPHjzY0r3Usez0rY6QCEUgSwEAtMFfb31YPvZC+zOQkO3YC39Nn6l/vbIsLywszHnYwsJCPp9HLzWDnb7VERKhCGQpAAAA8BYhEYpAlgIAAABvERKhCGQpAAAA8BYhEYpoQ5aaXVy7t7gmvF8AAAAA7BASoYhWZ6nVNWX4knwilS+VSs3oHQAAAID6hEQootVZ6uGT9URKTqTklULnZKmVWCTdNZDuGkj3jq0I2gms+7negXTXQLorkpsx7hxIh6caP3923N2z7l2ISMG4s980oWTiQSlygT5ZI2dzWSu7j/dkg+duWvFMPCipWtBrVk2g2032Gq5Fd4FUcfHX4Oy/+ZVYpOHXYL2WNO3kAG4JiVBEq7PU17lVNUstftcpWWo8VnuDv5/rHZiO3RewE1hL4VrQnBmb7ootkZ3VO+xUtstF19l/t+jMLMU9XwNRxJ66WUrQ+VxycioteWbiQeFJxFZLLkRIXKJyMNlLPa0dL+nSc7P+uZfCA+muzshS4zEEKehEQiIU0eosdW2umqXuL603o3ecWwpz3sUb3AksJsrUemwqS41RubqVb78s1QrbI0s1uefttIRpAilA7aVOoo5ABSMR+rRNuoaZsemugXRvLNsp41IAHUlIhCJanaWu17LUnx92xvJz7rtsgzsZK7HIdGwsq85k1YZk1JGYtH4nmfOK5ahbm/oRk/2UqRU3JDmmSSuxSDo8Ru3RxxonZ3aNm6UY1BgVzdhL93O9kWy4NqmqtfO+7hrZqUOxV62OL0iSFIlQ74ba3uqbZSYeDEYiQUmSIhcy8aAUidemdKplmDfsusW5BzAy8WAwHmcPoc+vPc7Eg1IkEuG3RF/EUCVpRXUv+TsYz5gVZ7KFvhN0F1GnQ0yPNKE1la7KeFpj17EXZUttEEp/CbUOvnChNoTG1tuEODgztVQbJje5NXFuPiuxSDocy+rXKmgvpdrr4n6udyAbG5tmjuTuVBT+aw2gMwiJUETbstT1uWIzesexqWxXJDdeuwtoU06N7GSoq6nUWwmZ6uJOb2k71U+W4SmF/rw4MzZdG8ih4ggzuqPVqGWISG5GnzPUxy7O7Br30jRUA/iltF6i117wr4sqRXaKvGpt6iYTD9LzTNpObR8zLqGfBNLlmzrFuQcw1OSipa5gPFMnS+mbwslS1AwVdyeZ1eLXojuSnNzQCfqLMO8Q3T9CMH7BdF2Swgz6UJGGd1qrrrOB/VfjZCnDBVafDZoHy0aZZinuzWclFklTLwf1AN2R5KVUS0v1d/Jfa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/>Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-21690922665639267302015-09-06T13:43:00.000-07:002015-09-06T13:43:59.312-07:00TactileJ'avais levé les yeux de mon livre et du dos de la main, pensive, effleuré le mur de la bibliothèque, son aspect m'ayant donné envie d'en connaître la texture. C'est alors que j'avais rencontré le regard du jeune homme en face de moi, qui m'avait vu faire ce mouvement ; mes yeux dans le vague s'étaient brusquement focalisés ; fragile comme l'anémone de mer, j'avais sous le seul effleurement de son regard replongé le mien dans mes études.<br />
<br />
Cette manifestation fugace de ma curiosité tactile avait suffisamment éveillé la sienne pour qu'il profite d'une de mes pauses pour récupérer mes coordonnées dans mon agenda, mais pas assez pour qu'il se comporte autrement qu'en butor une fois le contact noué.<br />
<br />
C'était en un autre lieu, un autre siècle. Le souvenir de ce jeune homme est depuis longtemps éteint en mon foyer.<br />
<br />
C'était en un autre siècle et aujourd'hui pourtant, chaque fois que je tends la main pour caresser un rocher partiellement recouvert de lichen, les feuilles duveteuses d'un végétal, la grosse trame d'un tissu, chaque fois que s'exprime dans l'espace public ma sensibilité tactile, je me souviens brutalement que je viens de montrer quelque chose de ma vulnérabilité - et du regard je cherche, comme par réflexe, qui aurait pu être témoin de mon geste - qui aurait pu, peut-être, l'interpréter à tort comme une avance, comme un stratagème de séduction à lui adressé - qui aurait pu le prendre comme une autorisation de me maltraiter.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-1989869507829618702015-08-31T10:33:00.000-07:002015-08-31T10:34:01.349-07:00Insulter sans offenseJ'aime bien "Mange tes morts !", comme insulte. Parce que c'est une insulte qui n'est ni misogyne ni homophobe, ce qui n'est pas si courant, ni discriminatoire pour quelque groupe que ce soit.<br />
<br />
Et pourtant, peut-être les Guayaki seraient-ils offensés qu'une de leur pratique funéraire soit utilisée comme insulte.<br />
<br />
Et je t'assure, tu veux pas offenser les Guayaki.Unknownnoreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-71136912366290748512015-08-24T06:11:00.000-07:002015-08-24T11:14:59.764-07:00Le recyclage des ossementsSur le site, il y a plusieurs squelettes humains presque entiers.<br />
<br />
C'est rare finalement de voir de si près des squelettes humains qui ne soient pas des trucs en plastique pour la décoration.<br />
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L'un, une tombe plus tardive est venue lui couper la jambe par le milieu, posée en biais par-dessus sans façons.<br />
<br />
Les os ont un aspect étrange, plat, comme des rubans. Mais après tout c'est peut-être leur aspect normal, je suis pas si familière des squelettes.<br />
<br />
D'un crâne dont les dents sont quand même incroyablement grosses on me dit non en fait ça c'est une tête de veau, c'est normal à l'époque on mettait vraiment n'importe quoi à l'intérieur des murs ça servait de poubelle.<br />
<br />
L'ambiance est archéologique, décontractée, pas recueillie pour un sou. <br />
<br />
Je suis d'abord étonnée qu'on laisse ces restes comme ça à ciel ouvert pour les visiteurs, même sur un site de fouille. Ça a été un cimetière, ces tombes étaient faites pour rester fermées. N'est-ce pas une profanation d'exposer ces ossements ? Autant d'ossements ? Que fait-on du respect de la mémoire des morts ?<br />
<br />
Et puis je me souviens qu'il n'était pas rare à l'époque d'ajouter deux, trois corps par-dessus le premier dans la tombe un fois celui-ci bien racorni. Et ainsi de suite. Que nos concessions actuelles ne sont, la plupart du temps, que temporaires, de cinquante ans au maximum, après quoi, en l'absence de renouvellement, les restes sont discrètement évacués.<br />
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Autrement dit : <i>un corps, ça n'a qu'un temps.</i> Les rites funéraires ne s'adressent pas à l'éternité, ils ont une limite temporelle. Une fois cette limite passée, les restes - ossements, débris, poussière - ne sont plus le mort, ne renferment plus sa mémoire.<br />
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Le temps du déroulement du rite, c'est le temps nécessaire à la déliaison ; à cesser de voir le défunt dans ces pauvres débris matériels qui ne lui ressemblent en rien. Une fois écoulé le temps jugé nécessaire à cela selon les cultures - parfois plusieurs dizaines d'années, parfois juste le temps de la cérémonie funéraire - ce n'est plus un corps humain, mais un simple déchet. Il n'est plus <i>tabou</i>. L'esprit a fui.<br />
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Pourquoi continuerions-nous à voir quelque chose de sacré dans ces os vieux de plusieurs siècles, quand la société même dont ils sont issus leur ôtait ce statut après quelques dizaines d'années ?<br />
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Les ossements cessent alors d'être des restes humains et redeviennent ce qu'ils sont exactement - rien qu'un peu de matière. Il est alors possible de les déplacer, de les jeter, de les utiliser comme matériaux de construction. Ou de les regarder sans émotion, pierres parmi les pierres, au milieu des vestiges d'un cimetière abandonné depuis près de mille ans.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-86420588018486810182015-08-23T08:28:00.002-07:002015-08-24T05:01:57.881-07:00Dom, sub et identités de genreIl faudrait sans doute trouver d'autres mots que ceux de dom / sub, qui peuvent rebuter en évoquant des systèmes d'oppression. Car ces termes ne désignent en réalité que très imparfaitement les rapports de domination et de soumission dans les jeux érotiques, qui ne jouent sur l'aliénation que de façon symbolique ; et où, bien loin que l'existence de l'un des partenaires soit niée au profit de l'affirmation de celle de l'autre, comme c'est le cas dans une dynamique oppressive, dans les rapports dom / sub en réalité tout est fait pour le ou la sub, qui est le centre et le but du jeu ; et le respect préalable de la personne du ou de la soumisE est la condition même du jeu de domination / soumission, ce qui en autorise l'existence, ce qui permet à sub de se remettre en confiance entre les mains de dom ; ce qui permet en outre aux rapports dom / sub d'être l'exorcisme et la contestation des rapports d'oppression réels.<br />
<br />
Mais surtout, dom et sub, cela peut être n'importe qui. Dom n'est pas nécessairement homme. Sub n'est pas nécessairement femme. Dom n'est pas forcément quelqu'un d'autoritaire dans la vie de tous les jours, sub n'est pas toujours timide et effacéE. Au contraire. Sub et dom peuvent chacun avoir toutes sortes de personnalités en-dehors de ces jeux, parfois en accord, parfois parfaitement à l'opposé de leur rôle de prédilection - vous seriez surpris comme les gens sont différents lorsqu'ils entrent dans le jeu. Il est impossible de deviner <i>a priori</i> si quelqu'un est plutôt dom ou plutôt sub avant d'avoir directement abordé - ou pratiqué - le sujet avec cette personne. Ni, d'ailleurs, si cette personne est bien dans le rôle qu'ielle a choisi ou tout à fait à côté de la plaque.<br />
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J'aimerais que l'on considère davantage nos conception des identités de genre femme / homme comme on le fait des rôles dans les jeux de domination / soumission.<br />
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Que chacun puisse choisir d'adopter une identité un peu, totalement, ou à divers degrés.<br />
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Que cette identité soit quelque chose qui fait l'objet d'un choix, non quelque chose qui s'impose à nous du dehors.<br />
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Qu'il ne soit pas meilleur d'être l'un ou l'autre - ou autre chose. <br />
<br />
Que l'on puisse sans problème inverser, être selon les jours parfois l'un, parfois l'autre. Selon ce que l'on sent, selon son humeur, comme un projet ou par envie de jouer. <br />
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Ou ni l'un ni l'autre. Que l'on puisse périodiquement poser le sac, se mettre en vacances des rôles de la comédie du genre, ou même déclarer de façon permanente que ces rôles-là c'est pas pour nous, pas notre came, que l'on n'a pas envie d'y jouer - et que ça ne pose aucun problème, ni à ceux qui aiment jouer à ces rôles, ni aux autres, parce qu'après tout un jeu n'engage que celleux qui y jouent, et si celleux-là s'y amusent, pourquoi perdraient-ils leur temps à vouloir forcer à y jouer celleux que de toute évidence cela n'amuse pas.<br />
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Que ces rôles soient quelque chose que l'on endosse de temps en temps, pour quelques heures, pour en faire quelque chose d'intéressant, non quelque chose que l'on porte jour et nuit comme un masque de fer.<br />
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Que l'on puisse commencer à jouer un rôle, en changer ou se désintéresser de ce jeu-là - préférer un autre jeu - à n'importe quel moment de son existence.<br />
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Qu'il soit encouragé de jouer avec les codes de ces rôles, ou d'en inventer de nouveaux.<br />
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Que chacun puisse choisir sa manière d'interpréter le rôle qu'il choisit, et s'il veut en reprendre tous les aspects traditionnels ou faire son choix parmi ceux-ci.<br />
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Ou choisir ce qui lui plaît dans chacun des deux rôles, pourquoi pas. <br />
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Que chacun ait conscience que ces rôles sont juste des rôles parmi tant d'autres, et que la distinction masculin / féminin n'existe que comme une parmi une infinité de polarisations possibles des relations humaines - qui, d'ailleurs, ne se bornent pas à des polarisations binaires.<br />
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Que personne ne s'autorise à préjuger de ce que l'on est simplement sur notre apparence extérieure - que ce soit quelque chose d'intime et de personnel, non quelque chose que l'on porte écrit sur son front, mais quelque chose que seuls les proches, ou tout simplement ceux que cela concerne, savent.<br />
<br />
Et que cela ne pose de problème à personne de ne pas savoir si l'on s'identifie comme homme ou femme - car chacun comprendrait que ce n'est qu'une toute petite partie de ce que l'on est, avec un champ d'application restreint, et absolument sans objet dans la plupart des situations de la vie.<br />
<br />
A celleux qui craignent de ne plus pouvoir, dans ce
contexte, trouver facilement d'"homme" ou de "femme", qu'ielles se
rassurent : le fait que ce ne soit pas marqué sur leur figure n'a jamais
empêché les adeptes de domination / soumission de s'apparier selon
leurs goûts et leurs attentes. La communication, la communication, la communication, mes
chériEs. Et le plaisir de la recherche, comme pour les girolles.<br />
<br />
A celleux inquiets à l'idée que peut-être ielles se trouveront fleureter avec quelqu'un sans savoir si cette personne s'identifie comme homme ou comme femme, qu'ielles se demandent ce qui est le plus important pour eux, que cette personne leur plaise ou qu'elle rentre dans la case qu'ielles ont définie par avance comme leur terrain de chasse (qu'ielles en profitent pour se demander si ça leur plaît vraiment de considérer la séduction comme une chasse. Si ça leur plaît c'est OK, c'est un rôle comme un autre, à condition de ne pas confondre le rôle avec la réalité parce que ce serait dangereux ; mais c'est important de savoir que c'est pas obligé). Et qu'ielles se rassurent : si mes vœux se réalisaient, personne, mais vraiment personne ne songerait à préjuger de leur identité de genre en se fondant sur celle de la personne qu'ielles fréquentent. Et personne ne songerait non plus à considérer qu'une identité de genre est glorieuse et toutes les autres dégradantes.<br />
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A celleux enfin qui crieront que je veux rendre tout le monde pareil et que je suis contre les différences, ou qui ont l'impression que je veux les forcer à ou leur interdire quoi que ce soit, qu'ielles relisent ce texte plus lentement. Avec tous les mots. Dans l'ordre. Plusieurs fois. Jusqu'à compréhension.<br />
<br />
Chacun, s'il s'examine avec honnêteté, prendra conscience qu'en réalité, c'est déjà le cas, les identités de genre femme / homme sont des rôles. Choisir un rôle - pas nécessairement un de ces deux-là - et l'interpréter à notre manière, c'est ce que nous faisons déjà tous, ou que nous aimerions faire. Il ne s'agit que de faire advenir cette réalité, de la faire passer d'inconsciente à concrète - qu'elle fleurisse, pour que d'un seul coup la vie entière devienne plus exaltante.Unknownnoreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-21660665820264704892015-08-22T04:38:00.000-07:002015-08-22T04:38:00.488-07:00Je te connais mieux que toi-mêmeIl y a ces gens, quand ils vous parlent, ils vous donnent l'impression qu'ils vous connaissent plus intimement que vous-même, chacun de leurs mots éclaire votre intériorité, d'une phrase ils dénouent les pelotes de nœuds indescriptibles avec lesquelles vous vous débattiez vainement.<br />
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Et d'autres qui semblent vouloir vous convaincre que votre corps est constitué à 70% de <a href="http://www.quimper-encheres.com/wp-content/uploads/2015/01/215015-5_1.jpg" target="_blank">cuillères-souvenir</a>.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-47355339537130197452015-08-20T09:39:00.000-07:002015-09-07T08:18:19.620-07:00Méditation 1<i>Je t'ai devancée, Fortune, et j'ai fait pièce à toutes tes intrusions</i>. <br />
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Comme il est en réalité très difficile, prenant cela pour but, de faire le vide dans son esprit, je décidai d'explorer celui-ci comme une chambre vide. Ce n'était pas une phrase, une idée ou un souhait, mais une expérience : éprouver cette sensation qui est la mienne d'avoir en moi un lieu calme et silencieux, prendre le temps de parcourir cette chambre vide.<br />
<br />
La chambre est calme et claire. Elle n'est pas immense - on ne peut s'y perdre - mais sa nudité donne une agréable sensation d'espace. La température y est idéale, et un délicieux courant frais la traverse, juste assez pour animer l'air. Je profite de l'impression de paix que je trouve dans cette chambre, je la parcours à loisir, son calme m'imprègne, je suis tout entière présente à cette expérience, mais d'une présence qui n'a rien de frénétique. Mon regard parcourt la pièce autour de moi, je me déplace un peu, je suis en ce lieu parfaitement posée, un sentiment de clarté dans mes pensées.<br />
<br />
Une découverte que je fais et qui me surprend, c'est que je n'ai pas besoin de rejeter le trouble hors de la pièce - hors de mon esprit - car il n'y est pas. Il reste dehors. Il ne peut y entrer. J'ai cherché, pratique courante en méditation, à le saisir pour l'expulser, mais impossible : je ne peux même pas me le représenter dans cette chambre vide. Il n'y est pas présent du tout. Je jouis de ce lieu intérieur sans trouble, et qui m'est donné tel. Ce n'est pas une tranquillité conquise de haute lutte - ce qui serait paradoxal - mais l'état dans lequel je trouve mon lieu intérieur, et que je goûte lorsque j'y porte mon attention.<br />
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Je découvre ensuite que la chambre n'est pas tout à fait vide. Il y a quelques meubles ou, plus exactement, quelques pôles. Il y a un lieu pour travailler, écrire, penser. Il y a un lieu pour se reposer. Les deux sont accueillants. Presque aucun livre, et nul autre objet. Les murs sont d'un blanc aimable, réfléchissant la douce lumière.<br />
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Le courant d'air frais que je sentais caresser mon visage provient de hautes fenêtres vers lesquelles je me tourne. Elles surplombent un magnifique paysage de villes, de collines et de rivières où le regard porte loin. A l'horizon, la mer. La lumière est douce, ensoleillée et légèrement brumeuse comme dans un tableau d'un peintre flamand. La chambre se situe en hauteur mais pourtant je n'éprouve aucun vertige. Elle est ouverte sur le monde - et parvenue au terme de cette méditation j'ouvre les yeux.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-47839382955839337512015-08-19T04:24:00.002-07:002015-08-23T10:17:28.012-07:00Le dévoilement<br />
<i>"Il est clair que, derrière le rideau, il n'y a rien, à
moins que nous ne le traversions nous-même, pour qu'il y ait à la fois
quelque chose à voir - et quelqu'un pour le voir."</i> <br />
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Parfois je perçois le monde comme à travers une paroi de plexiglas.<br />
<br />
Tout me semble lointain, je ne suis pas vraiment là. Ce n'est pas mon esprit qui vagabonde, mais les personnes avec qui je suis, je ne ressens pas leur présence, les émotions que je devrais éprouver, elles ne se produisent pas.<br />
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Peut-être que cette paroi invisible est là pour me protéger, comme les bébés bulle ou les grands brûlés. Mais elle me retranche également.<br />
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J'ai appris à ne pas trop m'en inquiéter. Bien sûr, c'est très désagréable. C'est même affreux. Mais à présent, quand cela se produit, je sais que cela ne correspond pas à une altération de mes relations avec autrui; je sais que c'est simplement cette paroi invisible qui s'est remise en place, qu'elle altère, momentanément, mon contact avec la réalité, mais que celui-ci reviendra. Il suffit d'attendre. Je patiente alors.<br />
<br />
Le monde, et les émotions qu'il génère, me parviennent comme à travers de minuscules trous d'épingle dans la paroi. Tout petits points de lumière sur un ciel - non pas obscur, mais opaque. Comme de rares étoiles se dévoilant par une nuit nuageuse.<br />
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Ces étoiles, il faut les saisir, les remarquer, sourire à leur éclat. C'est important. Car ce qu'elles disent, c'est qu'il y a, loin, là-bas, à des années-lumières, inaccessible, mais bien réel, un grand soleil qui réchauffe de ses feux ce qui l'entoure.<br />
<br />
Ce grand soleil, pour le moment, ne t'apparaît que comme une lumière minuscule et glacée, tête d'épingle dans une immensité obscure. Mais bientôt tu auras traversé la distance, et la chaleur de ses rayons baignera ton corps tout entier. <br />
<br />
Ces points de lumière vive m'indiquent la direction. Je sais qu'en les suivant, je pourrai rentrer chez moi.<br />
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Car contrairement aux étoiles du ciel, mes émotions ne sont pas à des années-lumière : elles sont là, à portée de la main. Juste derrière la paroi.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-34009471630596245622015-08-11T04:33:00.000-07:002015-08-20T09:42:27.509-07:00Chateau d'eauJe ne me suis jamais faite à cet endroit. Il a instantanément crispé chaque pouce de ma peau, et ce n'est que lorsque j'ai été certaine de bientôt le quitter que j'ai pu m'y détendre.<br />
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Dehors, il y a ce bruit permanent, rappellent le sifflement que fait parfois l'eau dans les canalisations. Sans doute une clim.<br />
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A l'intérieur, le bruit de la ventilation, grondement sourd, puissant, envahissant comme lorsque l'on ouvre grand un robinet, faisant jaillir l'eau à gros bouillons.<br />
<br />
Ces bruits évoquant l'eau, ils sont pourtant hostiles. Car ce n'est pas l'eau joyeuse, bondissante des fontaines et des ruisseaux. C'est l'eau des karcher, l'eau assourdissante des barrages hydroélectriques.<br />
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Pas le frais murmure de la nature, mais un eau industrielle.<br />
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Une eau dure comme un mur de béton en travers de ma tête.<br />
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Une eau si solide que l'on pourrait se fracasser contre.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5293042970495227039.post-87203715970871395652015-06-26T14:18:00.000-07:002015-06-25T14:25:18.283-07:00"Tu es beau"Lorsque je leur dis "tu es beau", certains sont gênés.<br />
Certains le prennent à la blague.<br />
Certain ne savent pas recevoir le compliment.<br />
Certains se sentent obligés de dire "merci, toi aussi" comme si c'était "bon appétit".<br />
Certains ont la voix qui crisse comme une craie, visiblement envie de fuir. <br />
Certains n'ont pas d'autre choix que de contredire pour surmonter leur embarras.<br />
Certains sont tout surpris.<br />
Certains jouent l'étonnement.<br />
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Toi, non. <br />
Toi : ce regard impénétrable dans tes yeux sombres, qui veut dire quelque chose comme : je sais. Et après ?<br />
<br />
Et tu as raison.<br />
Il n'y a pas de sens à la beauté.<br />
Rien n'est davantage une impasse.<br />
Beauté, et puis ça s'arrête là.<br />
Que dire de plus ?<br />
La beauté, c'est la fin. <br />
Elle est là, évidente, et ça ne nous aide en rien.<br />
Elle n'est d'aucun mérite, profondément absurde.<br />
Comme un drap jeté sur les choses, comme un inspir profond.<br />
Venant d'on ne sait où, ni pour combien de temps.<br />
Fardeau seulement si on la charge. <br />
<br />
Il n'y a pas de sens à la beauté.<br />
Pas de raison d'en être fier.<br />
Ni honteux d'ailleurs.<br />
Alors pourquoi faudrait-il que tu fasses semblant de ne pas le savoir, que tu es beau ?Unknownnoreply@blogger.com0