Ma mère est très gentille. Pour tout dire, elle est d'une gentillesse à pleurer. Elle est de la gentillesse des très faibles et des vieillards, ceux qui n'ont pas de forces à mettre au service d'une quelconque agressivité, ceux, aussi, qui savent que leur confort de vie dépend largement de la bonne disposition des autres à leur égard, et qui cherchent à la gagner par la réciprocité.
Elle ne parle vraiment pas fort. Elle contredit rarement. Elle se fatigue vite. Elle est toute petite, tassée sur elle-même, et sans les couleurs criardes dont elle s'habille couramment, sa présence se ferait oublier dès que le groupe dépasse quatre personnes. Elle s'efface. Elle vit par les autres. Elle considère que ses deux filles sont ce qu'elle a de plus précieux au monde.
Elle est vraiment très différente de la femme qu'elle était il y a vingt ans, et à l'époque, lorsqu'elle faisait des remarques acides sur mon poids, lorsqu'elle martelait des jugements péremptoires, lorsqu'elle vivait sa vie de femme libre et indépendante en laissant ses filles de côté, je n'aurais jamais imaginé que cette femme puissante, brillante, grande et belle, sûre d'elle-même, je n'aurais jamais imaginé que cette femme était en train de disparaître.
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